Ils descendirent avec un soulagement palpable de la plate-forme. Il faisait désormais nuit noire.
- « Venez. Je pense que vous devez avoir envie de dormir mais il faut d’abord que vous passiez un examen médical. »
La réaction des jumeaux surpris le général. Ils se montrèrent immédiatement méfiants et renfrognés. Ça se voyait comme le nez au milieu de la figure qu’ils ne voulaient pas aller chez le docteur. Thomas le sentait.
- « Allez, ce n’est pas la mort ! Par contre, si ta blessure s’infecte, le Chat, je ne te promets plus rien. » Et, voulant détendre l’atmosphère : « Comme ça, on pourra vérifier que vous êtes bien des êtres humains. Car après ce que j’ai vu, permettez -moi d’en douter. »
Curieusement, ça les renfrogna encore plus.
- « De toute façon, on n’a pas vraiment le choix. Médoc va me passer un savon pour ne pas vous avoir mené à l’infirmerie et vous n’y couperez pas non plus. C’est une vraie démone ma sœur ! »
- « L’infirmière est ta sœur ? »
- « Oui. Plus exactement ma demi -sœur. Même mère, pères différents. Mais, rassurez -vous, elle est qualifiée. Venez. »
Ils se dirigèrent vers une grande tente blanche frappée d’une croix rouge dont la barre verticale contenait un éclair. Le petit groupe entra dans une sorte de petite salle d’attente.
- « Et on fait quoi maintenant ?» Demanda le chat au général.
Pour toute réponse, celui-ci cria :
- « Médoc ! T’as de la visite ! »
- « Voilà ! J’arrive ! »
Une personne poussa la « porte » et entra. C’était une jeune fille, un peu plus âgée qu’eux, avec des yeux noirs semblables à ceux de son frère et habillée d’une blouse blanche. Elle était plutôt mince, la peau mate « comme les gens du désert », pensa Jeda. Ses cheveux frisés lui arrivaient aux épaules, elle dégageait une aura de bonne humeur, bien qu’elle ait l’air un chouïa fatigué.
- « Bonsoir ! » Puis, avisant les voyageurs, « Qu’est-ce que tu m’amènes là, Général ? »
- « Deux nouveaux dossiers pour toi ! » Répondit son frère. « Je leur laisse le soin de se présenter eux-mêmes ! »
Elle les jaugea du regard.
- « Bon. Qui se porte volontaire pour passer d’abord ? Thomas, c’est valable pour toi aussi, j’ai quelques vérifications à effectuer.»
Personne ne répondit.
- « Je fais vraiment si peur ? » Les taquina-t-elle.
- « Tu connais les hommes, » lâcha Jeda, « Ils sont bien courageux sur le champ de bataille ou devant un incendie mais dès qu’on doit aller chez le médecin ou parler amour il n’y a plus personne ! » Et elle ajouta : « moi je suis volontaire en tout cas ! »
Thomas rougit et se mit à protester et le Chat décocha un demi-sourire énigmatique. Tout le monde avait compris que la pique visait surtout le frère de Médoc. La doctoresse éclata de rire.
- Je sens qu’on va bien s’entendre toi et moi ! Allez, viens !
Une fois qu’elles furent entrées dans le cabinet de soins, Thomas glissa :
- Elle est vraiment très rancunière ta sœur…
- Ouais.
- Au fait…
- Quoi, Général ?
- Merci et Pardon.
Le chat se retourna.
- « Mais pourquoi pardon ? Tu ne m’as rien fait ! Merci ça je comprends par contre. Ce ne serais pas à propos d’une certaine chute ? » Ajouta-t-il avec un brin d’humour.
- J’ai laissé traîner mon épée sur la plate-forme. C’est comme ça que tu t’es fait mal…
- « Bah. Avec ou sans ton épée, j’aurai quand même dégusté. A la place, je me serais pris une poutrelle et ça aurai pu être pire. Tu as déjà vu une blessure à la tête ? Et ses conséquences ? Là c’est juste l’omoplate qui s’est pris un coup. Et je guéris très, très vite. Regarde. »
Il l’invita à examiner la plaie. Thomas poussa un cri de surprise.
- Ta blessure ! Elle est presque refermée !
En effet, la plaie était recouverte d’une croûte et ne saignai plus. Fait extraordinaire car la blessure était quand même assez profonde pour continuer à saigner une bonne heure encore.
- Mais c’est… Balbutia l’éclairite.
- Incroyable, je sais.
Le garçon n’avait même pas l’air étonné.
- Pour reprendre là où on était, je ne t’en veux pas du tout. Ce n’est pas de ta faute si l’ascenseur est dans un tel état ! J’en veux plutôt aux squeletites d’avoir incendié la plate-forme, et donc indirectement mis nos vies en danger. En plus, comme ça tout le monde est content !
Thomas hallucinait. Il n’avait jamais, au grand jamais, entendu une telle logique, tirée par les cheveux.
- Tu…Tu ne m’en veux vraiment pas ???
- Bah non ! Qu’est-ce que tu crois ?
De toute façon, songea le Chat, là j’ai déjà assez de rancœur en moi pour pas en rajouter…
C’est à ce moment-là que Médoc fit irruption dans la pièce.
- Alors, à qui le tour ?
- A moi ! Dit précipitamment Thomas, comme s’il avait peur qu’on lui prenne sa place.
- Pourtant mon cher, objecta Médoc, tout à l’heure tu me semblais un peu moins pressé pour entrer dans mon « antre » …
Thomas grimaça. Sa brûlure lui faisait de plus en plus mal.
- Médoc… Ce n’est pas le moment, s’il te plaît… Implora-t-il
Mais Jeda en rajouta une couche
- Aurais-tu peur de moi ou de mon frère à ce point, Général, pour aller te réfugier chez ta sœur ? Ha les mecs…
Thomas n’en pouvait plus. Et cette fille ne comprenait pas, mais alors pas du tout, l’état dans lequel il se trouvait. Il aboya :
- Boucle- la !
Il y eu un silence choqué. Que le Chat rompit en applaudissant lentement.
- Bravo Jeda ! Timing parfait ! Lança-t-il ironiquement. Puis, se reprenant : Y as vraiment des fois où tu devrais fermer ta grande gueule ! Quand on ne sait pas, on ne cause pas.
Sa sœur le regarda d’un air voulant sans doute dire : « Quoi ? Tu ne me défends pas ? »
Sans leur laisser le temps de plus réagir, Thomas s’engouffra dans le cabinet de Médoc. Une fois à l’intérieur, Médoc lui demanda ce qui lui avait pris. En guise de réponse, il enleva sa tunique et désigna sa brûlure. Elle suintait et avait l’air irritée. Médoc poussa une exclamation.
- Ton pansement ! Tu ne l’as plus ! Pas étonnant que ça te fasse aussi mal ! Mais je t’avais dit de…
Son demi-frère la coupa.
- Je l’ai donné à quelqu’un qui en avait besoin.
Et lui raconta tout l’histoire. Médoc soupira.
- D’abord tu sautes dans les flammes pour sauver tes copains puis tu tombes dans le vide et ensuite tu enlèves ton bandage ! Tout ça en moins de 3 jours ! Thomas, à ce rythme soit c’est toi qui vas en mourir, soit c’est moi à force de m’épuiser à te soigner !
Il sourit, l’air un peu canaille, et répliqua :
- Si c’est toi, tant mieux ! ça me débarrassera d’une sœur très enquiquinante !
La doctoresse tenta de lui donner une claque. Son frère l’évita facilement, mais grimaça. Elle le remarqua et fit la moue. Il fallait toujours que son frère fasse croire qu’il était plus fort ou plus résistant qu’il ne l’était vraiment… Cela pourrait mal tourner un jour, songea-t-elle.
- Allez, soupira Médoc, je vais soigner ça…Sale affaire ! marmonna-t-elle
Elle sortit d’une petite armoire un baume anti-brûlure, un bout de tissu usé mais ultra propre et une nouvelle bande et commença à soigner le général. Quelques minutes plus tard, elle annonça :
- C’est fait. Tu peux y aller.
Et comme il se dirigeai vers la paroi de toile les séparant de la salle d’attente, elle se repris.
- Tu peux y aller, mais pas dans cette tenue.
Thomas rougis. Il avait en effet omis de ré- enfiler sa tunique. Il la remit rapidement, boucla son ceinturon et sorti.
Pendant ce temps, une légère altercation avait eu lieu entre le Chat et sa sœur.
- Pourquoi tu l’as défendu ? Dit Jeda à son frère d’un ton aigre.
- Tu étais allée trop loin. Il était brûlé et il ne t’avait rien fait ! Et devine où a atterris le pensement qui devait le protéger ? Répliqua son frère.
Jeda ne répondit rien.
- Sur la blessure de la personne que tu es en train d’ignorer royalement, princesse !
- Ah…
- Bah oui « ah » !
Jeda finit par réagir.
- Je crois… Que je lui dois des excuses.
- Bien sûr que tu lui dois des excuses !
Jeda attendit la suite plus que probable de la diatribe de son frère mais ce dernier resta silencieux.
- Le Chat ? Pourquoi tu me fais cette tête d’enterrement ? Il y a un problème ?
Il répondit avec lenteur.
- Imagine… Que ce soit lui que nous devions tuer…
- Je ne pense pas.
- Et pourtant… Il y a une ressemblance que nous ne pouvons négliger…
Sa sœur resta silencieuse.
Où là ! Y a du mystère !!!!!!!